III Fractales célèbres
I La courbe de Von Koch
La
courbe de Von Koch la plus connue est construite de la manière suivante :
,
ce qui donne :
Mais
de nombreuses variations existent, en voici un exemple :
,
ce qui donne :
Toutes les fractales ne sont pas construites à partir d'un initiateur et d'un générateur, mais par contre le terme "itération" va revenir souvent. En effet, toutes les fractales sont construites en itérant un algorithme, qui diffère selon le type de fractale que l'on veut construire. L'ordinateur est alors un excellent outil pour dessiner des fractales puisqu'il est très doué pour effectuer des calculs, notamment la répétition de notre algorithme de construction. Revenons aux itérations : pour dessiner une fractale, nous allons programmer un algorithme, puis demander à l'ordinateur de le répéter un certain nombre de fois. L'écran de l'ordinateur affiche alors la représentation graphique d'une fractale au bout de n itérations. Mais il faut bien comprendre que ce n'est qu'une représentation graphique, et que le véritable objet fractal est une représentation au bout d'une infinité d'itérations. C'est pourquoi, lorsque nous étudierons les fractales, nous allons souvent faire appel aux limites, lorsque le nombre n d'itérations tend vers l'infini.
II-
Le tapis de Sierpinsky
Le
tapis de Sierpinsky se construit de la manière suivante :
|
|
|
...au
bout de 0 itération, |
...au
bout de 1 itération, |
...au
bout de 2 itérations, |
Intéressons-nous
à cette fractale... À première vue elle a l'air toute simple, mais elle cache
en fait des propriétés extraordinaires que nous allons étudier. Commençons
par généraliser ce que l'on a écrit sous les triangles : au bout de n itérations,
on a :
•
Soit Un le nombre de triangles noirs, Un=3n
•
Soit Vn le côté du triangle, Vn=1/2n
Cherchons
à calculer l'aire des triangles noirs. Pour cela, calculons l'aire d'un
triangle de base a.
.
Le triangle est équilatéral, donc la hauteur est égale à
.
L'aire d'un triangle noir est donc égale à
•
Soit Sn l'aire d'un triangle noir au bout de n itérations, on a
Mais
nous voulons l'aire de tous les triangles noirs. Soit An l'aire de
tous les triangles noirs, d'après ce que l'on a trouvé ci-dessus, on a
,
donc
.
Nous avons déjà vu que les représentations graphiques des fractales (par
exemple ci-dessus), sont juste des représentations au bout de n itérations. Si
l'on veut représenter la vraie fractale, il faudrait effectuer une infinité
d'itérations, ce qui est impossible. Mais on peut très bien étudier mathématiquement
le comportement d'une fractale, et c'est ce que nous faisons. Calculons donc
l'aire des triangles noirs après une infinité d'itérations, et pour ce faire,
nous allons calculer la limite de (An) quand n tend vers l'infini :
.
La suite (An) converge vers 0, donc l'aire des triangles noirs est
nulle au bout d'une infinité d'itérations. Cela peut paraître impossible,
mais c'est pourtant la réalité. Mais alors pourquoi voyons-nous des triangles
noirs à l'écran, alors que leur aire est nulle ? Pour deux raisons... La première
est que jamais on ne voit le vrai objet fractal puisque l'on ne peut pas représenter
le tapis de Sierpinsky au bout d'une infinité d'itérations, donc on ne peut
pas réellement vérifier visuellement cette affirmation. Et deuxièmement, ce
que nous voyons à l'écran, au bout d'un grand nombre d'itérations, c'est tout
simplement les côtés des triangles, côtés dont l'aire est nulle.
Voici la première propriété impressionnante du tapis de Sierpinsky, l'aire
des triangles noirs converge vers 0.
À
présent, intéressons nous à un tout autre problème. Soient trois points A, B
et C du plan. Prenons un autre point quelconque P0 situé à l'intérieur
du triangle ABC. Choisissons maintenant au hasard un des points A, B ou C -
mettons le hasard désigne B. Nous allons tracer le point milieu de [P0B],
P1. Recommençons l'opération : si le hasard désigne A, nous allons
tracer le point milieu de [P1A], P2. On obtient donc la
figure suivante :
Si
on répète l'opération un grand nombre de fois (sans tracer les segments,
juste en affichant les points), on obtient un ensemble de points qui représente
le tapis de Sierpinsky Encore une fois, l'objet que l'on obtient n'est pas la
fractale, c'est seulement quand le nombre d'itérations tends vers l'infini que
l'on obtient le véritable tapis de Sierpinsky Nous avons ici un attracteur,
c'est à dire que tous les points de notre plan sont "attirés" dans
un bassin d'attraction qui est le tapis de Sierpinsky Voici le dessin final que
nous obtenons après 30 000 itérations :
Le
tapis de Sierpinsky n'a pas fini de nous étonner ! À présent, construisons un
triangle de Pascal. On le construit de la façon suivante : on part d'une
grille, et à une des cases de la grille on assigne le nombre 1. En suite, on
assigne à chaque case la somme des chiffres des deux cases du dessus. Pour accélérer
le calcul, on peut fabriquer un triangle de Pascal dans un tableur (Excel,
AppleWorks...), on obtient la figure ci dessous :
À
présent, construisez un triangle de Pascal beaucoup plus grand... Effacez tous
les nombres pairs de la grille ; que ce passe-t-il ? Voici ce que nous obtenons
dans le tableur si nous demandons au logiciel de masquer les chiffres pairs et
de colorier en noir les autres cases :
Et
oui, nous obtenons le triangle de Sierpinsky ! Les fractales ont vraiment des
propriétés extra-ordinaires. Et pour terminer, voici une photo d'un coquillage
:
|
Impressionnant
coquillage (Cymbolia innexa REEVE) sur lequel on peut observer un enchevêtrement
de triangles de Sierpinsky |
III
L'ensemble de Mandelbrot
Cet
ensemble, découvert en 1981, est souvent considéré comme "la fractale la
plus complexe" et représente à ce titre le symbole des fractales. Il à
été découvert en tentant de résoudre le problème suivant (attention,
voilà la partie mathématique):
Soit
la suite Zn+1 = Zn2 + c
avec Z0 = 0 et c un nombre complexe quelconque. La
question que Mandelbrot s'est posé est la suivante: Suivant la valeur de c,
quelle comportement la suite va-t-elle avoir? Va-t-elle converger, diverger ou
être cyclique? L'idée est de balayer à l'aide d'un ordinateur une région de
l'espace des complexes. Pour chaque pixel de l'écran on associe une valeur de c
et on calcule le comportement de la suite associée. Si un Zi
possède un module supérieur à 2, c'est que la suite va diverger. On dessine
alors le pixel de la couleur i. Si au bout d'un nombre d'itérations
maximum n donné le module de Zn est toujours inférieur
à 2, on estime que la suite ne diverge pas et on affiche le pixel en noir.
. On
obtient alors:
Le centre en noir représente l'espace où la suite converge. Les couleurs indiquent les courbes de niveau, c'est à dire la vitesse de divergence de la fonction. A noter que l'ensemble de Mandelbrot est la frontière entre l'espace où la suite converge et l'espace où elle diverge. Il n'est pas visible par cet algorithme. En revanche, l'algorithme dit des distance (distance bound estimator algorithm) donne une bonne idée de la nature de l'ensemble, comme le montre les deux images suivantes (l'ensemble de Mandelbrot est représenté en blanc):
On
remarque que l'ensemble de Mandelbrot est très complexe. On a même
l'impression qu'il recouvre une surface. De fait, sa dimension fractale est de
... 2! L'ensemble est par endroit dense (au sens mathématique du terme)
dans R2.
Si
l'ensemble de Mandelbrot n'est pas auto-similaire dans le sens où les formes
rencontrées trahissent la zone de l'agrandissement, on peut tout de même dire
qu'il est "formé d'une multitude de copies de lui-même". En effet,
en examinant les agrandissements successifs suivants:
![]() |
![]() |
![]() |
on s'aperçoit que l'on retrouve la même forme. Où que l'on agrandisse, on retrouvera toujours au bout d'un moment ou à un autre la forme de départ!